A
la faveur d'une balade à cheval au coucher du soleil parmi
les champs de maïs, certaines silhouettes nuageuses avaient
éveillé mon attention. Je soupçonnait la
présence, loin à l'horizon ouest, de cumulonimbus
en plein développement. Avec l'arrivée de la nuit,
il n'y eu bientôt plus aucun doute lorsque j'aperçu
distinctement des éclairs, pourtant encore distant de 170
kilomètres. Sur les images délivrées par
les satellites, la superbe spirale d'une dépression était
en train de venir se lover au creux du Golfe de Gascogne. Dans
sa majestueuse giration, elle stimulait la naissance de toute
une série d'orages dont l'arc gracieux caressait la cote
avant de s'aventurer plus avant sur le milieu continental.
Passablement
excité, je me mis à guetter fiévreusement
l'occident où se multipliaient les palpitations électriques,
me demandant si ce front orageux allait avoir l'audace de franchir
la vaste forêt landaise pour atteindre les collines gersoises
d'où je la guettais ...
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A 23:04 j'obtiens ce cliché où la Voie Lactée
s'apprête à basculer derrière les nuages d'altitude
qui précèdent l'orage, dont on peut distinguer deux
foyers encore très distants. En ce qui concerne la Voie
Lactée, les amateurs reconnaîtront la portion qui
s'étend de la constellation de l'Ecu à celle du
Sagittaire.
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23:07
: Gros plan sur les nuages cumuliformes qui approchent, illuminés
de l'intérieur par des décharges fréquentes.
Il est temps pour moi de gagner un autre point du vue, afin de
bénéficier d'une vue plus dégagée
en direction de l'ouest. Les appels clignotants d'un autre foyer
actif situé en direction du nord-ouest me font un moment
hésiter quand à l'endroit à choisir, mais
j'opte finalement pour un pré dégagé du coté
de Saint-Orens-Pouy-Petit (nom invraisemblable mais bien réel,
vérifiez sur un atlas !) :
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23:40
: les choses se précisent ... Il y a plusieurs foyers orageux
distincts, qui jettent chacun de puissantes illuminations au-dela
d'une bande de nuage vaguement cumuliformes. Cette dernières
serait-elle une sorte d'arcus ? Rien ne permet d'en savoir d'avantage
pour l'instant, alors je me concentre sur ces éclairs qui
bombardent l'horizon. Le téléobjectif de 200 mm
me permet de réaliser plusieurs portraits de coups de foudre,
dont les deux suivants :
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23:45
: C'est le village de Gondrin qui orne l'horizon sur ces deux
vues séparées d'une minute. Notez la différence
d'intensité entre les deux clichés, et les teintes
plutôt chaudes offrant une ambiance lumineuse particulière.
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J'apprécie la présence de ces nuages bas déchiquetés
(fractus) qui apportent un supplément de profondeur à
l'image. Ce type de nuage est très fréquent sous
ou à l'abord des orages, ils révèlent le
refroidissement local et turbulent de l'air en basse couche, ce
qui est le plus souvent produit par l'irruption de courants de
densités frais et humide accompagnant les précipitations.
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23:55
: Grâce aux halos lumineux produits par Valence-sur-Baïse
et surtout Condom (respectivement à gauche et à
droite sur cette vue prise avec un objectif à très
grand angle), je discerne de mieux en mieux des éléments
disposés parallèlement dans cette espèce
de millefeuille de nuage qui va bientôt me survoler. Cette
image volontairement surexposée (10 s, 800 iso, f/2.8)
révèle mieux ces structures que ce que permettait
l'observation à l'oeil nu, l'adaptation à l'obscurité
étant dans une certaine mesure compromise par les lueurs
intenses et répétées des éclairs.
Le
vent qui jusqu'à ce moment soufflait de l'est s'arrête
complètement en quelques instants. Singulières minutes
où l'air paraît étrangement plus chaud et
moite, où l'arrêt du bruissement nocturnes des chênes
fait soudain paraître plus proche le tonnerre sourdant de
l'horizon aveugle.
Cela
ne dure pas car c'est tout aussi rapidement que va s'établir
un vent soufflant en sens contraire, une agréable brise
d'ouest qui rapidement va se muer en rafales impressionnantes,
me contraignant à tenir mon trépied au milieu du
rugissement soutenu qu'impose le souffle d'Eole aux futaies voisines.
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Quatre
minutes plus tard, l'arcus est là, immense, majestueux
et imposant.
Et,
par bonheur, il ne pleut toujours pas, ce qui me permet de saisir
encore quelques éclairs :
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Le
rideau de précipitation est bien visible, juste au-delà
des éclairs, là où le plafond nuageux, remarquablement
dessiné, cesse pour laisser place à une vaste mur
indistinct qui diffuse abondamment la lumière des décharges.
Une
p'tite dernière pour terminer :
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La
pluie abondante qui se mit ensuite à tomber ne me permit
pas de prendre d'autres photographies. L'orage allait très
rapidement perdre en vigueur en poursuivant sa progression vers
l'est, ce qui ne me surprit pas vraiment.
Et
maintenant, à quand le prochain ?
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